Port des Barques

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vendredi 18 août 2017

Luiz Mizon un second volet de l'oeuvre


                            1

         Dans quel jeu te caches-tu ?
         dans quel tarot
         usé par des bandits apparaît ton visage ?

         es-tu une femme blessée ?
         une femme lapidée accusée d'adultère
         et de lèse-majesté ?
         es-tu encore vivante ?

         le murmure de ta peau réveille
         mon murmure
         j'écoute un fleuve de poussière doré
         rivière et ruisseau

         c'est toi ou c'est moi ?

         in Le soudeur de murmures, éditions Folle Avoine, 2017, p.25

Ce dernier recueil de Luiz Mizon, paru en mars 2017, suit de peu celui évoqué la semaine précédente. La poésie fuse sous des formes surréalistes de l'écho d'un sonar au chant d'une sirène, tandis qu'un secret fragile se défait sans rien dire au milieu de l'océan.

                            II

         1

         J'écris sur une brique
         la liste de mes choses cassées
         par exemple les sirènes
         les sirènes habillées de sang et de suie
         par le soleil couchant
         appuyées contre le mur
         peint d'argile rose

         et celle qui me tourne le dos en rêvant
         elle dit deux ou trois mots
         sans écho
         et descend l'escalier
         vers une mer plus profonde
         que la vibration du bleu

         ibid p.29

         3

         J'ouvre la fenêtre et ma pensée s'envole
         détachée de ma main

         j'ai un clou
         un marteau un tableau et la mer
         le vent souffle mais je suis fatigué
         j'aime le silence
         d'un voilier immobile
         et son reflet qui danse
         sur la racine du Sud

         ibid p.31


         6

         De la pierre au visage
         du visage à la parole
         de la parole au poème
         combien de tourbillons ?

         chaque tourbillon
         abrite d'autres tourbillons
         puits de lumière qui tourne
         pierre qui a besoin de chanter

         ibid p.34

Ce besoin de chanter des choses, le poète est seul à le percevoir et l'exprimer avec une justesse et une intensité toute personnelle. Transmission unique, que chacun reçoit à sa manière ou pas du tout, mais quand le courant passe, quelle ivresse nous offre ce fabuleux métier de "soudeur de murmures" !


                             IX


          2

          Un arbre pousse sous le ciel déchiré
          camaïeu de lumière noire
          ardoise du vent
          mes chiffres et calculs se sont effacés
          dans la poussière du ciel
          seule une balançoire nous sauve
          du naufrage du requin
          de la tempête

          ibid p.58

Ce dernier poème m'évoque le souvenir d'une modeste planche de bois, pendue par deux cordes à une branche d'arbre et langoureusement bercée par les alizés, à qui je dois mes premières envolées lyriques. Il faut parfois beaucoup de silence et d'ennui pour pénétrer le monde féerique de la poésie.

bibliographie:
  • Le soudeur de murmures, éditions Folle Avoine, 2017
sur internet :





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